La taxation carbone : un outil pour lutter contre le réchauffement climatique
Face à l’urgence climatique, de nombreux pays à travers le monde ont mis en place des dispositifs de taxation carbone. Cette mesure vise à inciter les entreprises et les particuliers à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre en augmentant le coût des produits et services fortement émetteurs de CO2. La France n’échappe pas à cette tendance, avec l’instauration de la taxe carbone en 2014 et son évolution progressive au fil des années.
La taxation carbone s’appuie sur le principe du « pollueur-payeur », selon lequel les acteurs économiques doivent assumer les coûts environnementaux liés à leurs activités. En fixant un prix sur les émissions de carbone, cette mesure envoie un signal prix fort aux entreprises et aux consommateurs, les encourageant à se tourner vers des solutions plus sobres en carbone et à investir dans des technologies propres.
Les différentes formes de taxation carbone dans le monde
Il existe plusieurs approches pour mettre en place une taxation carbone :
- La taxe carbone directe, qui s’applique aux émissions de CO2 générées par la combustion d’énergies fossiles (pétrole, gaz, charbon). C’est le modèle retenu par la France, la Suède ou encore le Canada.
- Le système d’échange de quotas d’émission (ETS), qui fixe un plafond d’émissions pour les entreprises concernées et leur permet d’acheter ou de vendre des quotas en fonction de leurs besoins. L’Union européenne a instauré son propre ETS en 2005.
- La taxe carbone aux frontières, qui vise à éviter les fuites de carbone en taxant les importations de produits issus de pays aux normes environnementales moins strictes. Ce dispositif est envisagé par l’Union européenne pour compléter son ETS.
L’impact de la taxe carbone en France sur les ménages et les entreprises
En France, la taxe carbone a été intégrée à la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE). Son montant a progressivement augmenté, passant de 7 euros par tonne de CO2 en 2014 à 44,60 euros en 2018. Cette hausse a eu des répercussions sur les prix des carburants et du chauffage, suscitant des mécontentements parmi la population, comme l’a illustré le mouvement des Gilets jaunes fin 2018.
Pour les entreprises, la taxe carbone représente un coût supplémentaire qui peut peser sur leur compétitivité, en particulier pour les secteurs fortement émetteurs de CO2 (industrie lourde, transport routier, etc.). Afin d’atténuer ces effets et d’éviter les délocalisations, des mécanismes de redistribution et d’accompagnement ont été mis en place, comme le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) ou les aides à la transition énergétique.
Les défis de la taxation carbone à l’échelle internationale
Au-delà des enjeux nationaux, la taxation carbone soulève des questions de coordination et d’harmonisation à l’échelle mondiale. En effet, pour être pleinement efficace dans la lutte contre le changement climatique, cette mesure doit être adoptée par le plus grand nombre de pays possible, afin d’éviter les distorsions de concurrence et les fuites de carbone.
Cependant, les niveaux de taxation carbone varient encore fortement d’un pays à l’autre, reflétant des ambitions climatiques et des contextes socio-économiques différents. Selon la Banque mondiale, en 2021, seuls 45 pays et 34 juridictions infranationales avaient mis en place une tarification du carbone, couvrant environ 22 % des émissions mondiales de gaz à effet de serre.
Pour renforcer la coopération internationale en matière de taxation carbone, plusieurs initiatives ont vu le jour ces dernières années. On peut citer notamment la Coalition pour un leadership en matière de tarification du carbone, lancée lors de la COP21 à Paris en 2015, qui rassemble des gouvernements, des entreprises et des organisations de la société civile en faveur d’une tarification efficace et coordonnée du carbone à l’échelle mondiale.
Perspectives d’avenir pour la taxation carbone
Malgré les défis et les résistances rencontrés, la taxation carbone apparaît comme un outil incontournable pour accélérer la transition bas-carbone et atteindre les objectifs de l’Accord de Paris. Son efficacité dépendra toutefois de sa bonne articulation avec d’autres politiques climatiques, comme les réglementations, les normes ou les incitations à l’innovation.
À l’avenir, il est probable que la taxation carbone continue de se généraliser et de monter en puissance, sous l’impulsion des engagements climatiques des États et de la pression croissante de la société civile. Cela nécessitera une attention particulière aux enjeux d’équité et d’acceptabilité sociale, afin que cette mesure soit perçue comme juste et efficace par les citoyens et les acteurs économiques.
En France, la Convention citoyenne pour le climat a proposé en 2020 de rehausser progressivement la taxe carbone pour atteindre 65 euros par tonne de CO2 en 2025 et 180 euros en 2030, tout en mettant en place des mesures d’accompagnement pour les ménages et les entreprises vulnérables. Si ces propositions n’ont pas été retenues en l’état par le gouvernement, elles témoignent de l’importance croissante de cet outil dans le débat public et les politiques climatiques du pays.
À l’échelle européenne, la révision en cours du système ETS et le projet de mécanisme d’ajustement carbone aux frontières pourraient renforcer significativement la tarification du carbone dans les années à venir, contribuant ainsi à accélérer la décarbonation de l’économie du continent.
En définitive, la taxation carbone apparaît comme un instrument clé pour orienter les comportements et les investissements vers une économie plus sobre en carbone. Son succès dépendra de sa capacité à concilier efficacité environnementale, justice sociale et compétitivité économique, dans un contexte de coopération internationale renforcée face à l’urgence climatique.