
L’impact environnemental du numérique : comment réduire l’empreinte carbone des data centers
L’empreinte carbone croissante du numérique : un enjeu d’envergure mondiale
À l’heure de la transition énergétique et écologique, l’impact environnemental du numérique devient une source majeure de préoccupation. Si les usages digitaux sont souvent perçus comme immatériels, leur infrastructure repose sur une réalité bien physique : serveurs, câbles, terminaux et data centers. Ceux-ci consomment d’importantes quantités d’électricité et génèrent une empreinte carbone numérique croissante. À l’échelle mondiale, on estime que le secteur du numérique représente entre 3 % et 4 % des émissions de gaz à effet de serre. Un chiffre appelé à doubler d’ici 2025 selon de nombreuses études.
Parmi les éléments les plus énergivores du système numérique figurent les centres de données. Ces infrastructures, indispensables au stockage et au traitement de l’information, sont essentielles à la vie économique, mais aussi à nos usages quotidiens : cloud, mails, vidéos, réseaux sociaux, objets connectés, etc. S’interroger sur l’impact environnemental du numérique revient donc à se pencher sur celui des data centers et sur les leviers à activer pour en réduire leur empreinte carbone.
Pourquoi les data centers sont si énergivores ?
Les data centers, ou centres de traitement des données, hébergent des milliers de serveurs. Ces derniers fonctionnent en continu, 24h/24 et 7j/7, nécessitant une alimentation électrique stable et une refroidissement constant pour éviter la surchauffe. En moyenne, selon le rapport de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), un data center consomme autant d’électricité que plusieurs milliers de foyers.
Trois sources principales de consommation énergétique peuvent être identifiées :
- L’alimentation des serveurs : pour faire fonctionner les équipements informatiques utilisés pour le stockage, le traitement et la gestion des données numériques.
- Le refroidissement : les serveurs génèrent beaucoup de chaleur, nécessitant un système de climatisation performant.
- Les infrastructures annexes : alimentations de secours (générateurs), réseaux internes, modules de sécurité et de surveillance.
À cela s’ajoute la localisation des data centers. Dans certains pays, l’électricité est fortement carbonée (charbon, gaz), influençant directement l’empreinte carbone du numérique. L’origine de l’électricité utilisée constitue donc un facteur déterminant pour analyser les impacts environnementaux.
Réduire l’empreinte carbone des data centers : les leviers d’action
Face aux enjeux environnementaux et à la pression accrue des citoyens, des régulateurs et des acteurs économiques, plusieurs solutions émergent pour limiter l’impact énergétique des data centers. Voici les principales pistes explorées aujourd’hui :
Optimisation de la consommation énergétique
Améliorer l’efficacité énergétique des infrastructures reste une priorité. Cela passe notamment par le recours à des technologies plus économes, la virtualisation des serveurs et une meilleure gestion de la ressource informatique (usage du cloud mutualisé, stockage optimisé).
Le PUE (Power Usage Effectiveness) est l’indicateur de référence en la matière. Il mesure l’efficacité énergétique d’un data center. Plus il est proche de 1, meilleure est l’efficacité. Les acteurs les plus avancés parviennent à atteindre des PUE inférieurs à 1,2, quand la moyenne mondiale dépasse encore 1,6.
Recours aux énergies renouvelables
L’un des leviers les plus puissants pour réduire les émissions carbone des data centers est de modifier leur mix énergétique. Le recours aux énergies renouvelables (solaire, éolien, hydraulique…) permet de limiter l’utilisation d’énergies fossiles. De grands groupes comme Google, Microsoft et Amazon Web Services (AWS) ont déclaré viser une alimentation 100 % renouvelable pour leurs infrastructures de données dans les prochaines années.
Parallèlement, certaines entreprises optent pour l’implantation de data centers dans des régions où l’électricité est majoritairement décarbonée, comme en Suède ou en Norvège.
Refroidissement durable et innovations techniques
Le refroidissement représente jusqu’à 40 % de la consommation énergétique d’un data center. Des solutions innovantes permettent désormais un refroidissement plus écologique :
- Refroidissement par air libre (free cooling), utilisant l’air extérieur plutôt que des systèmes de climatisation énergivores.
- Immersion cooling : les serveurs sont plongés dans des liquides diélectriques pour dissiper la chaleur.
- Récupération de la chaleur fatale : valorisation de la chaleur produite par les serveurs pour chauffer des bâtiments ou des réseaux urbains.
Écoconception des centres de données
La conception même des data centers peut être repensée pour en limiter l’impact, tant lors de la construction que durant l’exploitation. Cela inclut l’utilisation de matériaux durables, une architecture passive pour favoriser l’aération naturelle ou encore des solutions modulaires, plus faciles à adapter aux besoins réels.
Allongement de la durée de vie des équipements informatiques
La course à l’hyper-performance et à la miniaturisation entraîne une obsolescence rapide du matériel informatique. Or, la fabrication des composants (serveurs, disques durs, routeurs, etc.) mobilise des ressources rares et contribue à l’empreinte carbone globale. Encourager la maintenance, la réutilisation et le reconditionnement des équipements est donc fondamental pour un numérique plus sobre.
Le rôle des acteurs publics et privés dans la transition numérique responsable
La transformation du secteur numérique vers une moindre empreinte environnementale implique la mobilisation conjointe des entreprises, des utilisateurs et des pouvoirs publics. Ces derniers peuvent imposer des normes environnementales plus strictes, encadrer les pratiques industrielles, promouvoir la transparence ou encore soutenir la recherche dans le domaine des technologies vertes.
Du côté des entreprises, l’émergence de stratégies RSE (Responsabilité sociétale des entreprises) intégrant la sobriété numérique devient une tendance forte. L’engagement sur des objectifs carbone clairs et mesurables constitue un levier compétitif, en particulier face à des consommateurs de plus en plus attentifs à l’impact environnemental du numérique.
Ce que les utilisateurs peuvent faire pour réduire leur impact numérique
Si les data centers sont au cœur de l’impact carbone du numérique, les comportements individuels influencent directement le niveau de sollicitation de ces infrastructures. Quelques gestes simples, lorsqu’ils sont mis en œuvre à grande échelle, peuvent contribuer à réduire cet impact :
- Limiter le stockage de fichiers inutiles dans le cloud (mails, vidéos, documents obsolètes).
- Privilégier les services numériques écoresponsables (hébergeurs verts, moteurs de recherche durables, etc.).
- Réduire la qualité de visionnage en streaming (HD versus 4K), ou télécharger les contenus au lieu de les visionner en ligne.
- Allonger la durée de vie de ses équipements numériques grâce à la réparation ou au reconditionnement.
Le numérique, bien qu’invisible à l’œil nu, a un impact bien réel sur notre environnement. En comprenant mieux les mécanismes de cet écosystème, notamment ceux des centres de données, chacun peut devenir acteur d’une transition numérique plus durable.